Les Bourbaki : une famille de soldats grecs au service de la France

Charles Denis Sauter Bourbaki, Officier français.

Devenu Général et Commandant en chef de la garde impériale du second Empire, il est né à Pau (Pyrénées-Atlantiques), le 22 avril 1816 et s’est éteint à Cambo, le 27 septembre 1897. Il est enterré au cimetière de Saint-Etienne, à Bayonne.

Français patriote, brillant soldat, Européen avant l’heure par ses origines franco-hispano-grecques, amoureux de la France, Bourbaki est aujourd’hui oublié  parce que ses guerres furent d’un autre temps. Il a néanmoins laissé des noms de rues dans quelques villes ainsi qu’à Pau ; il a également donné son nom à une expression utilisée dans l’armée française, « l’armée à Bourbaki », qui désigne une armée mal équipée d’un peu tout et n’importe quoi : allusion à l’unité que lui confia à la hâte l’Etat-major français pendant la guerre perdue de 1870.

Il existait autrefois à Pau, une statue du général Bourbaki rendant hommage à ce Palois de naissance, Place Albert 1er.

statue_bourbaki

Elle fut réquisitionnée sous l’occupation et fondue (source : Pau d’Antan, Renée Mourgues, Hc Editions, 2010). A sa place fut érigé un monument à la gloire de la Résistance.

Bourbaki, son père et son grand-père, forment d’abord et avant tout une lignée de soldats toujours engagés aux côtés de la France.

Sauter Bourbaki

Son grand-père, Constantin Sauter Bourbaki (en grec, Sotirios Vourvachis – Βούρβαχης), marin grec originaire de Céphalonie et issu d’une famille crétoise, avait déjà servi la France. Selon plusieurs auteurs, il avait traversé la Méditerranée de Marseille jusqu’à Alexandrie en tant qu’émissaire spécial de Bonaparte, évitant les  navires turcs et anglais hostiles, pour permettre au futur Empereur de communiquer secrètement avec la France ; selon d’autres, il fut également le pilote du navire qui ramena Bonaparte en France. Sur son lit de mort, il écrivit à Napoléon pour lui demander de prendre soin de ses deux fils, nés en Grèce et qu’il avait envoyés adolescents au Prytanée de Paris, à Louis-le-Grand. A titre de remerciements posthumes l’un de ses fils, Joseph, lieutenant de dragons, fut nommé vice-consul de France à Céphalonie, tandis que l’autre, Constantin Denis Bourbaki, fut placé à l’école des officiers de Fontainebleau.

Denis Bourbaki

Né en 1787 à Céphalonie, Constantin Denis Bourbaki est plus généralement connu sous le nom de Denis Bourbaki soit, en grec, Dionysios Vourvachis. Les faits d’armes de Denis Bourbaki, le futur père de Charles Denis Bourbaki, lui permirent de prendre du galon. Farouche combattant, il s’illustre sur tous les champs de batailles – en Italie, en Espagne, et à la bataille d’Orthez. Sous-lieutenant à 17 ans, il devint colonel d’infanterie au fil des combats, resta fidèle à Napoléon Bonaparte, et le suivit après l’île d’Elbe jusqu’à la défaite.

Après un séjour en Italie puis en Grèce, il se marie avec Charlotte de Rica et Ponzoti, rencontrée à Madrid ; c’est à Pau que naquit leur fils Charles Denis Sauter Bourbaki, en 1816 ; l’enfant sera baptisé à l’église St-Martin de la même ville.

Obligé de se réfugier en Espagne sous la restauration en raison de son passé bonapartiste, puis revenu en France, Denis Bourbaki est sans cesse victime de tracasseries administratives. Pour ces mêmes motifs, il est contraint de changer plusieurs fois de domicile et vit pauvrement. Alors qu’il avait choisi de s’établir à Pau, il devra s’installer successivement à Nay, Tarbes, Lourdes, Bazas, Bagnères-de-Bigorre, Paris… Il est tout de même naturalisé français. Il est plusieurs fois provoqué en duel devant témoins par le Capitaine Isidore de Lafitte, officier royaliste qui le prend en grippe; les duels ne sont pas interdits à l’époque, mais Denis Bourbaki craint une manipulation visant à l’emprisonner. Après une énième provocation, le 7 février 1821, il accepte son treizième duel à Rontignon, près de Pau. Il est blessé mais abat le capitaine de Lafitte devant témoins, et sous les yeux du Maire de Lourdes.

Il apprend la dégradation de la situation dans le Péloponnèse, où les Grecs se battent pour leur indépendance. Il sait que la France envisage d’y envoyer un corps expéditionnaire. Compte tenu de ses états de service, il obtient l’avis favorable de la Chambre des députés de réintégrer l’armée dans l’un des régiments désignés pour participer à cette expédition. Vaine démarche : l’avis des députés ne reçut jamais application et se heurta finalement au refus du Ministre de la guerre de Charles X, toujours en raison des anciennes sympathies bonapartistes du colonel Bourbaki.

Denis Bourbaki s’engage donc directement et à titre personnel dans les rangs des combattants grecs. Il meurt sur le champ de bataille à la tête de ses hommes, en 1827, face aux troupes du Sultan, à Kamatéro (en Attique, près d’Athènes). Plusieurs ouvrages rapportent que le général Reşid Mehmed Paşa lui fit trancher la tête pour l’envoyer au Sultan ; selon certaines versions, la décapitation intervint alors qu’il vivait encore et qu’il venait juste d’être capturé.

Charles Denis Sauter Bourbaki

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Devenu orphelin de père alors qu’il n’était pas encore adolescent, Charles Denis Bourbaki eut pour tuteur le colonel de Rumigny, futur aide de camp de Louis-Philippe. Il devient officier après une longue formation au collège royal militaire de La Flèche et à Saint-Cyr.

Très populaire en son temps et connu pour sa fougue et son allure, il sert en Algérie y compris à la tête des zouaves, puis en Crimée, à nouveau en Afrique, devient général de division, et participe à  la campagne d’Italie contre les Autrichiens, puis à la guerre perdue de 1870.

 

Ce sera sa dernière guerre, et l’un des épisodes les plus tristes de sa vie militaire, comme ce fut le cas pour de nombreux officiers français rongés par cette défaite et cette guerre mal préparée : on lui confie à la hâte le commandement de l’armée de l’Est, hétéroclite, mal entraînée, mal équipée et dont il doute des capacités ; malgré une victoire à Villersexel où il mène lui-même la contre-offensive, il doit battre en retraite après la bataille de la Lizaine. Cela heurtera son sens de l’honneur à tel point qu’il se tire une balle dans la tête – mais la balle ricoche sur son crâne et il est amené en Suisse pour être soigné, puis rentre en France.

 

Sa carrière militaire prendra fin 10 ans plus tard, en 1881. En 1885, il tente en vain de se présenter au Sénat. Il finit ses jours entre les hauteurs de Bayonne, où il exerce de multiples activités et demeure en sa villa Saint-François, et Cambo-les-Bains où il soigne son asthme, pour finalement y mourir en 1897.

 

Dans un ouvrage publié peu après sa mort, on pouvait lire, à propos de son intérieur :

« Un mot maintenant sur l’habitation de prédilection du général : un simple corps de logis, à un seul étage et assez exigu dans son ensemble. Le visiteur y chercherait en vain des apparences de luxe; on n’y trouve ni grands tableaux militaires, ni ces souvenirs ou trophées de guerre que les militaires recherchent comme une preuve de leur existence mouvementée et agitée, mais des croquis d’architecture grecque ou ancienne provenant des legs de sa famille; on ne dirait vraiment pas la résidence d’un soldat dont le nom a figuré dans toutes les guerres du second empire, en Afrique, en Crimée, en Italie… « 

Panayiotis Lipsos

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