
« 1453 », la couverture. Dans le fond, la basilique Sainte-Sophie de Constantinople, encore chrétienne, avant qu’elle ne soit transformée en mosquée par le conquérant de la ville. Avec l’autorisation des éditions Anubis – un clic pour agrandir.
Constantinople, Constantiniye, Istanbul.
Le 29 mai 1453 la capitale de l’Empire romain d’Orient, ou Empire « byzantin », tombe entre les mains du Sultan ottoman Mehmet II.
Cette date exerce encore sa fascination. Chez les Grecs modernes, descendants directs des « Byzantins » – qui s’appelaient eux-mêmes « Romains » et avaient le grec, qui pour langue maternelle, qui pour langue véhiculaire.
Mais aussi en Turquie: en témoignent le film turc « Fetih 1453 » (« la conquête 1453 ») sorti en 2012, tout à la gloire du conquérant ottoman, ou encore la fanfare Mehter qui célèbre la conquête de la ville tous les 29 mai à Istanbul.
La BD ne pouvait pas être en reste.
Deux Grecs, le dessinateur Nikos Pagonis et le scénariste Orestis Manousos, ont proposé dès 2008 l’adaptation en bande dessinée de la prise de celle que les Grecs nomment encore « la Ville » (η Πόλης, i pOlis).
Le graphisme de « 1453 » rappelle sensiblement l’univers des jeux vidéos d’alors.
La BD se lit comme un sympathique scénario d’action, marqué par l’exotisme d’une époque méconnue.
Elle regorge de références historiques.

Aux couleurs de la Sérénissime, Nikiphoros Kallérgis arrive à Constantinople. Avec l’autorisation des éditions Anubis – un clic pour agrandir.
Le lecteur est invité à suivre les traces de Nikiphoros (Nicéphore) Kallérgis, un jeune archer crétois au service de la République de Venise, qui possède alors la Crète. Nikiphoros décide de rester défendre Constantinople avec ses compagnons d’armes. Le nom de « Kallérgis » est sans doute un clin d’oeil du scénariste. Ce patronyme prestigieux revient souvent à travers les siècles dans l’histoire de la Crète et de la Grèce (jusqu’au 20ème siècle, via la figure controversée de Richard Nikolaus de Coudenhove-Kalergi).
Nikiphoros découvre une ambiance de fin de règne, et une cité qui n’est plus que l’ombre d’elle même, détruite deux siècles plus tôt par les Chrétiens d’Occident, comme il le rappelle au détour d’une page.

Déspina, la jeune Génoise, en moniale orthodoxe. Avec l’autorisation des éditions Anubis – un clic pour agrandir.
Il y croise des portraits qui brossent le contexte: la fille d’un commerçant génois qu’il sauve du lynchage (une brève allusion aux sanglantes tensions qui émaillent l’histoire tardive de l’Empire byzantin, entre la population byzantine et les commerçants génois souvent privilégiés par un pouvoir byzantin corrompu), ou encore un religieux plus obsédé par les querelles entre catholiques et orthodoxes que par la défense de la ville, sans oublier Giovanni Giustiniani, encore un Génois qui, sans l’appui de la République de Gênes, se porta volontaire avec 400 Génois et 300 Grecs des îles de la mer Egée pour secourir la Ville (espérant, dit-on, se voir attribuer l’île de Lemnos en échange) et y mourut. Enfin Constantin XI Paléologue, le dernier « Basileus » (en grec « Βασιλεύς », « Roi », le titre des Empereurs byzantins).
La BD nous épargne les trois jours et nuits de pillages et d’atrocités qui suivront la fin du siège et la mise en esclavage de ses 25.000 derniers habitants, tout en y faisant une cruelle allusion.

L’assaut des troupes ottomanes. Dans « 1453 » les Ottomans sont principalement appelés « Αγαρηνοί » (Agarini), nom par lequel les Byzantins désignaient souvent les Musulmans. Avec l’autorisation des éditions Anubis – un clic pour agrandir.
Au final une bonne petite BD. Le sujet à lui seul justifie le détour.
A ce jour l’album « 1453 » n’a pas été traduit en français.
1453
ISBN13 9789603066743
Εditeur ANUBIS
Décembre 2008
140 pages
Tous nos remerciements aux éditions Anubis et à leur maison mère Compupress qui nous a fourni les planches publiées.
PL
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