On y accède directement par la porte du cimetière située à l’angle de l’avenue du Père-Lachaise et de la rue des Rondeaux, dans le 20ème arrondissement de Paris. 88ème division, avenue des Combattants Étrangers Morts pour la France.
La victoire de Samothrace surplombant une colonne ionique, et ces mots : « À la mémoire des engagés volontaires hellènes morts pour la France 1870 – 1914-1918 – 1939-1945 ».

En partie supérieure, on lit cet extrait attribué à Périclès par Thucydide dans son Histoire de la guerre du Péloponnèse, « ΑΝΔΡΩΝ ΕΠΙΦΑΝΩΝ ΠΑΣΑ ΓΗ ΤΑΦΟΣ » que l’on trouve ainsi traduit : « les hommes éminents ont la terre entière pour tombeau » (Thucydide, livre II, XLIII). « A la mémoire des engagés volontaires hellènes morts pour la France 1870, 1914-1918, 1939-1945 ». Sous la colonne on trouve également les mentions A.F.N. – « Anciens combattants d’Afrique du Nord » – et T.O.E. – « Théâtre des Opérations Extérieures » (non visibles sur la photo). Photo PL – un clic pour agrandir.
Le monument fut érigé en 1953 au cimetière du Père-Lachaise par l’association des anciens combattants engagés volontaires Hellènes dans l’armée française. Avec, selon la plaque apposée près du monument, les dons « de la colonie hellénique », des Philhellènes de France et de l’Union française, sur un terrain offert par la Ville de Paris. Il rappelle ces oubliés de l’histoire franco-hellénique, à proximité du monument érigé à la mémoire des combattants arméniens.

Photo PL – un clic pour agrandir.
En passant devant, on ne peut s’empêcher de penser que par delà la Grande Histoire, il y a cette multitude d’histoires particulières, les destins de chacun de ces hommes croisant celui de la France.
D’où venaient-ils, qui étaient-ils ? Quelle patrie perdue avaient-ils laissée derrière eux pour la France ? Quelles saveurs, quels paysages, quel dialecte hellénique avaient-ils en tête lorsqu’ils songeaient au passé ?
Il existe un autre monument, numérique celui-là, qui peut nous aider à trouver quelque réponse : la base de données « Mémoire des hommes », qui met en ligne les archives du Ministère de la Défense.
En effectuant une recherche nominative, les vies défilent sur les fiches d’époque.
Et les origines.
Grecs de Grèce, ou Français dont le nom grec témoigne de parcours insoupçonnés.
Ne cochez surtout pas la case « Grèce » du formulaire de recherche. Vous vous mettriez des œillères, comme à chaque fois qu’on essaie d’aborder la réalité grecque à travers le seul territoire de la Grèce actuelle.
Il y a aussi, en grand nombre, ces « Grecs d’ailleurs », souvent des Grecs de l’Empire ottoman venus de ces terres où furent portés des noms si grecs pendant des siècles et où on n’en entend pratiquement plus aujourd’hui ; de ces lieux de naissance qu’on n’écrirait plus de la même manière sur un registre officiel français : « Constantinople » (au lieu d’Istanbul), « Asie mineure » (au lieu de « Turquie »), Smyrne (au lieu de « Izmir »).

Autre fiche du même Jean Sotiropoulos, « né à Aïvaly, Département : Asie mineure » (sic) – un clic pour agrandir.

La fiche de Jean Pétridis « né à Constantinople, Département : Turquie » (sic) – un clic pour agrandir.
Ces « Grecs indéterminés », fruit d’une histoire qui n’a même plus de mots pour les décrire. Frontières mouvantes, enracinements millénaires auxquels ne correspond aucune donnée administrative… Le règne de « l’indéterminé » est peut-être une constante de l’histoire hellénique et nous en avons ici un bel exemple.
Prenons Nicolas Micropoulos, dont on lit qu’il est né en 1908 « à Conia [sic] Asie mineure », mort entre le 1er septembre 1939 et le 25 juin 1940 et dont le registre nous dit que sa nationalité est : « indéterminée ».
– un clic pour agrandir.
Au titre des « indéterminés » citons encore Solon BOYADJIDAKIS, mort pour la France le 25 janvier 1945 à Dacfran (Allemagne), « né(e) le/en 30-01-1893 à Smyrne (Asie (pays indéterminé)) [re-sic] ». Ou comment une base de données administrative se perd parfois, quand il s’agit de donner un nom au pays d’origine d’un Grec d’Anatolie né à la fin du 19ème siècle (d’autres registres indiquent « Asie mineure », d’autres « Turquie », ladite Turquie n’existant pas alors, s’agissant de l’Empire ottoman).

Extrait de la base des militaires décédés pendant la Seconde Guerre mondiale – fiche informatisée de Solon BOYADJIDAKIS – un clic pour agrandir.
Et puis, il y a ces histoires atypiques et compliquées, comme celle du légionnaire Panayiotis ANAGNATOPOULOS, d’origine grecque mais né en 1902 à Philadelphie en Pennsylvanie, aux Etats-Unis, engagé volontaire étranger mort entre le 1er septembre 1939 et le 25 juin 1940.

Certains noms ne figurent que dans des listes, sans fiche individuelle – extrait de la base des engagés volontaires étrangers entre le 1er septembre 1939 et le 25 juin 1940 – un clic pour agrandir.
Pour exhumer quelques noms au hasard des archives de ces morts pour la France, un biais : la recherche par les suffixes « poulos », « akis », « akos », « idis » que l’on retrouve dans nombre de noms grecs – ce qui élimine malheureusement les autres noms de la recherche. Les prénoms et lieux de naissance faisant le reste.
Que leur simple lecture soit la forme d’un hommage rendu.
Qu’on ne les oublie jamais quand on songe aux relations franco-grecques.

Le site « Mémoire des hommes » – recherche dans la base nominative – un clic pour agrandir.
Panayiotis Lipsos
Bonjour!
Ce texte existe-t-il rédigé en grec? J’aimerais le faire lire à mon groupe de philhélènes, mais en grec.
Merci pour votre réponse.
Christine
Bonjour. J’ai rédigé le texte directement en français. Je n’ai pas actuellement le temps de le refaire en grec mais si vous vous sentez de faire une ébauche de traduction nous pouvons la travailler ensemble. Καλή συνέχεια
C’est un intéressant article
Passionnant! Mille mercis. Mon grand-père a eu la chance de survivre à la 1ère guerre (engagé volontaire venu de Kalymnos), il est mort en 1939 avant la seconde guerre mondiale…Vos recherches et vos commentaires éclairent cette histoire que tant ignorent à mon grand regret!